Discours inaugural de la Prof. Irène Rabenoro Présidente de l’Académie Malgache Ouverture officielle de l’Année académique 2024-2025 Jeudi 24 octobre 2024 – Palais de l’Académie Malgache
- Monsieur le Secrétaire Général de la Présidence, représentant Son Excellence Monsieur le Président de la République,- Monsieur le Grand Chancelier de l’Ordre National Malgache,
- Monsieur le Vice-Président de l’Assemblée Nationale,
- Monsieur le Secrétaire Général du Gouvernement, représentant Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement,
- Monsieur le Président sortant de l’Académie Malgache, Professeur François RAJAOSON,
- Monsieur le Président d’honneur de l’Académie Malgache,
- Madame la Directrice Régionale de l’Agence Universitaire de la Francophonie pour l’Afrique Australe et l’Océan Indien,
- Madame et Messieurs les Vice-Présidents de l’Académie Malgache,
- Monsieur le Président de la Section Antsiranana de l’Académie Malgache,
- Monsieur le Président de la Section Fianarantsoa de l’Académie Malgache,
- Monsieur le Président du Collectif des Professeurs des Universités de Madagascar,
- Cher.e.s Consœurs et Confrères Membres de l’Académie Malgache,
- Honorables Invités,
- Mesdames et Messieurs,
Mes plus vifs remerciements à vous tous venus honorer cette séance de votre présence.
Je me tourne vers vous, Prof. François Rajaoson, un ami de longue date, du temps où j’étais étudiante à l’Université de Madagascar dont vous avez été le Recteur pendant plusieurs années. On ne m’a toutefois pas vue très souvent sur les bancs de la faculté étant donné que je m’étais consacrée à donner des cours de lecture et d’écriture au milieu des rizières du côté d’Ankazomanga à des enfants qui n’avaient pas accès à l’école Vous n’avez donné que les grandes lignes des activités qui ont pu être menées sous votre direction, vous en avez menées bien d’autres. Je me rends compte que le travail de président de l’Académie est un travail à plein temps, sans indemnisation ni récompense. Toute mon admiration pour l’énorme travail que vous avez fourni dans ces conditions.
Je tiens également à adresser mes remerciements aux membres du Centre des langues de l’Académie Malgache à Rarihasina, aux membres du CMEST – Comité malgache d’éthique pour les sciences et les technologies, et aux membres du Centre de prospectives. Mais cette Académie fermerait ses portes sans vous, les membres du personnel administratif et technique, qui travaillez dans des conditions particulièrement difficiles. Merci !
Mes remerciements vont en particulier à l’Association des Amis de l’Académie, non seulement ici mais aussi au niveau des provinces. Merci beaucoup car sans vous, l’Académie ne pourrait pas travailler au quotidien ni encore moins organiser des colloques et rencontres scientifiques.
J’adresse également mes remerciements à vous, les présidents de section régionale, Messieurs Athanase Tongavelo, président de la Section Antsiranana et Dr Ratalata, président de la Section Fianarantsoa. Merci à vous Monsieur le président de l’Université de Toamasina, ainsi qu’à vos collaborateurs, pour votre détermination à mettre en place la Section Toamasina de l’Académie Malgache. A vous également et à vos collaborateurs, Monsieur le président de l’Association des Amis à Toamasina, car vous avez beaucoup aidé dans la tenue du Colloque sur les enjeux de la maritimisation qui s’est tenu récemment à Toamasina. Je suis l’hôtesse de la maison depuis mon élection le 1er octobre, jusqu’à fin septembre 2027. C’est pour cela que je vous salue tous. Je suis membre de l’Académie depuis 31 ans.
Ce que j’ai apprécié ici, mis à part que c’est un lieu de présentation de communications scientifiques, c’est qu’on y apprend énormément de choses, qu’on y réfléchit et qu’on y échange. Il n’y pas de mauvaises surprises ici : quand un évènement est programmé, il a effectivement lieu et il est rare qu’il y ait du retard dans la programmation. Il y a des traditions qui demeurent à ce jour. La Section I Sciences de l’art et du langage se réunit tous les premiers jeudis du mois. La Section II Sciences morales et politiques se réunit tous les deuxièmes jeudis du mois. La Section III Sciences fondamentales et la Section IV Sciences appliquées se réunissent tous les troisièmes jeudis du mois. Et la séance plénière se tient le dernier jeudi du mois. Les séances sont publiques, et il en est de même des manifestations scientifiques particulières. Par exemple, il était question récemment d’organiser des journées consacrées à l’examen de la question éducative, y compris l’enseignement supérieur, car elle est fort préoccupante à l’heure actuelle. La date n’est pas encore fixée, mais on espère recevoir l’appui des autorités de tutelle de l’Académie. Faute de moyens suffisants, l’Académie ne peut plus assurer la publication du Bulletin de l’Académie Malgache et des Mémoires de l’Académie Malgache qui ont pourtant fait sa réputation de par le monde. Aussi allons-nous publier en ligne, sur le site Web de l’Académie, les communications scientifiques qui satisfont aux normes internationales. Nous vous invitons à visiter le site :www.akademia-malagasy.mg
Tous mes remerciements à Monsieur le Chancelier car je suis sûre que c’est grâce à lui qu’il y a des textes en anglais sur le site, et pas seulement en malgache et en français. On souhaite que le site de l’Académie devienne un site de référence. Ainsi, on envisage de publier sur le site les décisions prises par l’Académie, par exemple la politique linguistique adoptée au niveau national lors de la réunion de toutes les sections de l’Académie qui s’est tenue à Toliara le 17 juin 2019. De même, la décision prise par les membres titulaires de l’Académie le 24 juillet 2018 quant à la façon de compter en malgache devrait y figurer.
Ce que j’ai apprécié aussi dans cette Académie c’est qu’on peut y exprimer ses opinions et discuter même s’il y a divergence de vues au plan politique. Quand on est dans ces lieux, on se respecte et on s’écoute. La science unit, la politique ne divise pas les membres. Cela a été le cas encore dernièrement, lors des “Journées d’échanges sur les violences et l’insécurité à Madagascar » des 4-5 septembre dernier. Du reste, je tiens à féliciter la Section des Sciences morales et politiques et plus particulièrement la coordonnatrice générale de ces Journées, la vice-présidente Ramisandrazana Rakotoariseheno. Avec un thème pareil, il n’était pas facile d’organiser ces Journées. Des responsables actuels et d’avant étaient là à échanger, mais il y avait aussi des chercheurs qui ont présenté leurs communications. Le débat fut parfois houleux, mais la courtoisie était de mise.
Sur un autre point : la participation des chercheurs non professionnels aux activités de l’Académie. Il y a eu par exemple Monsieur Régis Rajemisa Raolison, l’auteur de l’unique dictionnaire unilingue malgache à ce jour, qui y a travaillé seul sans ordinateur. On se rappelle aussi Monsieur Faridanonana, qui a élaboré et publié un dictionnaire de la variété malgache Tsimihety. Ces dernières années, des joueurs de valiha ont présenté les fruits de leurs recherches à l’Académie. Il est en de même de quelques peintres, dont notre confrère Hemerson Andrianetrazafy, élu secrétaire perpétuel de la Section I Sciences de l’art et du langage. L’Académie est ouverte non seulement aux titulaires de hautes qualifications et aux doctorants mais aussi aux chercheurs individuels et aux jeunes préparant leur mémoire de Master. On pense également sensibiliser les médecins et les professeurs de médecine car il n’y en a plus beaucoup qui sont assidus aux séances de l’Académie. Il y a des médecins qui se réunissent fréquemment dans cette maison, peut-être pourraient-ils monter à l’étage pour rendre visite à l’Académie.
Concernant la langue malgache, les Indonésiens de la Negeri Rempah Foundation sont venus voir avec nous en octobre 2023 comment on pouvait collaborer avec eux. Il faudrait saisir l’occasion pour faire avancer les recherches sur la langue malgache, notamment sur les variétés géographiques du malgache. A ce propos, je parlerai un peu du Centre des langues de l’Académie Malgache dont le directeur général est le président de la Section Sciences de l’art et du langage, Monsieur Rabenalisoa Ravalitera. J’espère qu’on pourra organiser des cours de malgache standard et de variétés géographiques du malgache au sein de ce Centre des langues. On a en effet besoin des dialectes, ne serait-ce que pour renforcer les liens entre Malgaches. Mais on a aussi besoin des variétés de langue non officielles pour une meilleure communication dans le cadre de projets divers. C’est du reste un bon moyen pour préserver ces variétés de langue locales et les développer car l’enseignement d’une langue contribue beaucoup à son développement. Ces enseignements des variétés standard et non standard du malgache seront mis à profit pour améliorer le contenu aussi bien que la manière de les enseigner. A l’instar de l’enseignement de quasiment toutes les langues du monde, il faudrait adopter l’approche communicative pour les enseigner. Dans le cadre du projet Appui au bilinguisme à Madagascar, un volumineux ouvrage basé sur l’approche communicative avait été élaboré à l’intention des enseignants de malgache et de français et diffusé. Ce projet a vu la coopération entre le ministère malgache de l’Education et de la Recherche scientifique malgache d’alors et le SCAC Ambassade de France. L’objectif est que les apprenants puissent acquérir leur langue maternelle de façon à renforcer leurs capacités de réflexion, et de manière à ce qu’ils puissent s’initier à d’autres langues plus aisément. Mais mis à part le français, il faudrait aussi améliorer les compétences dans la langue de la mondialisation – l’anglais. De mon point de vue, les citoyens ont le droit d’utiliser leur variété de langue maternelle mais ils ont aussi le droit d’acquérir la variété standard de cette langue.
A propos de la coopération avec d’autres AcadémiesNous coopérons déjà avec l’Académie des sciences d’outre-mer à Paris mais nous allons bientôt travailler avec l’Académie de l’Ile de La Réunion, grâce à un séjour de Monsieur Ranjatohery, notre maître de cérémonie d’aujourd’hui, à La Réunion. Il me faut souligner que l’Académie Malgache s’appelle en fait "Académie nationale des arts, des lettres et des sciences". Ainsi, nous sommes membres du NASAC, le Réseau des Académies des sciences d’Afrique. Bien que les relations aient été rompues du fait que le NASAC avait utilisé une adresse électronique qui n’existe plus depuis longtemps, les liens ont très récemment été rétablis. Ils ont même déjà envoyé des appels à candidatures à des bourses. Ils m’ont également invitée à participer à la 20e Assemblée générale des membres du Réseau et au Colloque annuel qui se tiendront fin novembre à Alger. Le thème du Colloque est "Resources, Science and Technology for development in Africa" et la première femme à présider l’Académie n’étant pas tout à fait compétente en la matière, elle fait appel à ses collègues des sciences dures pour l’aider à préparer les interventions qu’elle aura à faire lors de ces réunions à Alger. Toujours à propos de nos relations internationales, un début de coopération avec un Think Tank indien, le DAKSHIN, a vu le jour en juillet.
Ces relations internationales supposent l’utilisation des trois langues : le malgache, le français et l’anglais. La décision de l’Académie de proposer l’utilisation de l’une ou l’autre de ces langues date des années 1980 si je ne m’abuse. On peut également envisager la reprise de la coopération avec d’autres Académies, par exemple l’Académie des sciences de France, de Russie, du Maroc… si cela nous paraît intéressant. Mais avant tout raffermissement ou extension de la coopération avec d’autres Académies, il nous faut renforcer les liens entre nous au niveau national. Affaires nationales et affaires internationales sont étroitement liées. Le but ultime et premier de la science est l’amélioration de la vie des humains.
Le calme est précaire chez nous en ce moment. Bien des gens ne distinguent plus le bien du mal.
C’est pour cela que je dis :
Pour développer le pays, il faut des gens compétents et des intellectuels en nombre, des gens qui travaillent dur, qui ont l’appui des pouvoirs publics et qui agissent pour le bien du pays et de ses habitants.
Je vous remercie.